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Obligation de déplacer un transformateur irrégulièrement implanté.

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Le conseil municipal de la commune de Sury-le-Comptal avait décidé, par une délibération en date du 26 février 1991, de mettre à la disposition de EDF un terrain pour l’implantation d’un transformateur. En exécution de cette délibération, le maire de la commune avait signé une convention de mise à disposition de terrain avec EDF. Estimant être propriétaire du terrain en cause, les requérants ont sollicité du maire qu’il déplace, aux frais de la commune, ce transformateur irrégulièrement implanté sur leur propriété.

Devant le silence de l’administration, les requérants ont sollicité du Tribunal administratif de Lyon qu’il annule la délibération du 26 février 1991 ainsi que la décision du même jour par laquelle le maire a conclu la convention de mise à disposition. La requête était assortie de conclusions à fin d’injonction afin que la commune et la société ERDF, venue aux droits de la société EDF, procèdent au déplacement du transformateur litigieux.

Par un jugement en date du 2 février 2012 (TA Lyon, 2 février 2012, M. et Mme Ozdemir, n° 0907116), le Tribunal administratif a rejeté leur requête en estimant que l’ouvrage n’était pas irrégulièrement implanté. C’est de ce jugement que la Cour administrative d’appel fut saisie par une requête enregistrée le 16 avril 2012. Confirmant le défaut de qualité pour agir des requérants s’agissant de la délibération autorisant le maire à signer une convention de mise à disposition d’un terrain, la Cour a dû trancher le litige au fond après intervention de l’autorité judicaire afin de déterminer le propriétaire exact de la parcelle en cause. La décision commentée, rendue le 15 mars 2016, constitue une nouvelle illustration de la capacité du juge administratif à ordonner le déplacement d’un ouvrage faisant partie du réseau public de distribution d’électricité s‘il est mal implanté.

De toute évidence, le litige en cause dans la décision commentée reposait tout d’abord sur une appréciation à la fois juridique et factuelle tenant à savoir qui était propriétaire de la parcelle sur laquelle était implanté le transformateur litigieux. Le Tribunal administratif avait ainsi estimé « qu’à la date de la décision d’implanter le transformateur, le propriétaire du terrain avait donné son accord tant sur le principe même de l’installation de l’ouvrage que sur la cession du terrain au profit de la commune de Sury le Comtal » et que la Commune avait depuis acquis le terrain qui formait donc une « dépendance du domaine public ». Il avait simplement relevé que seule une « erreur dans la tenue du cadastre » indiquait que le transformateur litigieux était situé sur la propriété des requérants. Sans se poser davantage de question, il avait donc rejeté la requête.

Dans son arrêt avant-dire-droit du 8 octobre 2013 (CAA Lyon, 8 octobre 2013, M. et Mme Ozdemir, n° 12LY01025), la Cour administrative d’appel de Lyon a néanmoins estimé que la question de la propriété de la parcelle de terrain présentait « une difficulté sérieuse qu’il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire de trancher ». Et c’est une fois la propriété des requérants sur la parcelle où est implanté le transformateur litigieux reconnue par la Cour d’appel de Lyon, que la Cour administrative d’appel a pu juger le litige, forcément de façon antagoniste au juge de première instance. Selon la Cour en effet, dès lors que la société ERDF n’a ni droit ni titre pour implanter le transformateur litigieux sur le terrain des requérants, la convention de mise à disposition est entachée de nullité et la décision de la signer doit être annulée. Par ailleurs, les requérants « ne sauraient être tenus de supporter l’occupation sans droit ni titre d’une parcelle de terrain dont ils sont propriétaires, alors que la présence de l’ouvrage les prive de la possibilité de jouir pleinement de leur bien ». Constatant qu’aucune mesure de régularisation n’a pu aboutir, la Cour a relevé que « l’implantation du transformateur litigieux dans le prolongement du jardin de la maison d’habitation des requérants porte une atteinte certaine à la jouissance qu’ils ont de leur bien ». Dès lors, alors même que la société ERDF « se borne à évoquer le caractère techniquement difficile du déplacement de l’ouvrage, le coût de l’opération et le fait que l’ouvrage permet d’alimenter cent quatorze foyers », la Cour a jugé que « ces inconvénients ne suffisent pas, dans les circonstances de l’espèce, eu égard notamment à la nature et à l’importance de l’ouvrage en cause, à établir que ce déplacement comporterait une atteinte excessive à l’intérêt général » au regard des conséquences résultant de la présence de cet ouvrage sur la propriété des requérants.

Ce faisant, opérant son bilan entre le coût et les avantages du transformateur litigieux, la Cour estime que les seconds sont trop faibles au regard du premier. Elle a dès lors enjoint à la commune de Sury-le-Comtal de faire procéder, à ses frais, à l’enlèvement du transformateur litigieux dans les six mois.

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